Dès la fin des années 80, une musique d’un genre inédit connait une popularité grandissante dans toutes les banlieues, au-delà des frontières américaines ou elle a vu le jour, une musique qui semble à l’usage exclusif d’un public de « banlieusard » : il s’agit du RAP.
On retrouve les précurseurs français de cette musique dans une compilation sortie en 1990 « Rapattitude » avec des artistes comme EJM (Elément Dangereux), Tonton David (Peuples du monde), ou encore ASSASSIN et NTM (je rap : inédit dans tous leurs albums).
Beaucoup de productions voient le jour, néanmoins ce n’est pas exagérer de clamer haut et fort, qu’en cette période de nouveautés, la ville de Vitry sur Seine a joué un rôle de tout premier plan dans l’âge d’or du Rap, lorsque sort de l’une de ses cités le groupe LES LITTLE, en proposant un style original et underground, composé de trois jeunes talentueux: SULEE B, RONALD L et DJ SEK.
La ville des LITTLE, est indissociable du groupe lui-même tellement les Vitriots sont fiers d’où ils viennent. Cette volonté se retrouvera dans le célèbre groupe 113 moins de dix ans plus tard. A eux trois LES LITTLE sont porteurs de toutes les caractéristiques de la déferlante Rap Français : un langage argotique propre à leur ville (le Veul), des arrangements élaborés loin des pillages actuels, et des textes imprégnés de revendications politiques et sociales, tranchant sur les problèmes de cette fin de siècle.
Mais LES LITTLE sont plus que ça. Lorsque sort en 1992 leur album « Les Vrais » ils deviennent instantanément les représentants d’une nouvelle école de rappeurs. Ce sont de véritables poètes qui osent traiter de sujets novateurs : La drogue et ses méfaits (la drogue est un poison), dénonciation de comportements déviant (plus féroces pour faire mal), un quotidien de banlieusards troublant (journée de fou) et parviennent à imposer un genre totalement nouveau (à l’instar d’un Matt quelques années plus tard) avec « Laisse faire le tempo » véritable pépite de RnB français. Ils se démarquent même en utilisant l’humour pour quelques intro (la définition du H & Bitch).
Dans un registre que l’on pourrait nommer « Rap non commercial » LES LITTLE bénéficient malgré tout d’un buzz phénoménal pour l’époque. Ils font un duo avec Manu Dibango, réalisent un clip pour ce qui reste (à mes yeux) la meilleure chanson de l’album « Ressens le son », font parler d’eux sur rapline et se produisent sur pas mal de scènes Hip-hop d’alors.
En 1994 le groupe a probablement eu l’intention de faire un comeback avec une nouvelle dénomination « les Da lauss » (comprenez un « Lauss » un Pote dans le dictionaire veul…), mais sans que cela aboutisse véritablement, à part avec quelques mix tape qui circuleront dans les établissements scolaires de Vitry. Et encore parmi les affiliés (perso je n’ai pu écouter qu’une seule des chansons des Da Lauss…). Mais je n’ai pas vraiment de connaissances de cette période donc je n’affirme rien.
Il est tout de même triste de constater que le succès commercial n’a pas cessé de leur échapper en même temps que la popularisation du Rap en France, malgré la preuve de leurs énormes compétences que constituent les 16 chansons de leur album. Seul un autre groupe les remets à l'ordre du jour pour un featuring, à l'aube de l'an 2000, les N.A.P pour un maxi : "Les vrais" sous leur nom officiel LES LITTLE.
Avec LES LITTLE on a eu la chance d’écouter un groupe qui se démarquait du reste des artistes de l’époque. Un groupe original et alternatif, moins hard que les SUPREME NTM et cependant tout aussi respecté dans toutes les banlieues parisiennes. Les SUPREME NTM feront même appel à Sulee B, renommé alors Sulee B Wax, pour les arrangements de la chanson « Laisse pas trainer ton fils » de leur dernier album.
A défaut d’être considérés comme un groupe fondateur du Rap français, ces artistes de Vitry sur Seine ont traversé les années 90 en produisant un unique album qui plus de vingt ans plus tard n’a pas pris une ride et continue de ridiculiser un paquet de chanteurs actuels.
Le seul problème dans cet article, c’est que je ne connais pas certaines choses que j’aurais aimé expliquer. L’histoire de leur rencontre, comment ils ont réalisé leur album, la liste des concerts qu’ils ont effectués, le nombre de vente de leur album, comment ils ont rencontrés MANU DIBANGO… mais il en va de soit avec un groupe « underground » tel que le leur, dont certains détails resteront comme eux : ignorés à jamais…
A moins que vous le sachiez, et dans ce cas n’hésitez pas à nous le faire savoir…
En tout cas : leur album est toujours plus de quinze ans après, un must musical que j’écoute régulièrement et je me devais de leur faire un clin d’œil, un hommage. Dédicace aux LITTLE !